plan :
* le mythe.
* Définition
* Aspects des mythes
*Typologie et éléments des mythes
* Quelques mythes célèbres
* Héros et objets du mythe
* Divinités communes
* Objets d'étude : Le personnage de roman - Les réécritures.
Don Quichotte
Faust
Don Juan
Robinson Crusoé
Le détective
Le robot Le monstre
La ville.
Un mythe
Un mythe est un récit
qui se veut explicatif et surtout fondateur d'une pratique sociale. Il est
porté à l'origine par une tradition orale, qui propose une
explication pour certains aspects fondamentaux du monde et de la société
qui a forgé ou qui véhicule ces mythes :
- la
création du monde (cosmogonie) ;
- les
phénomènes naturels ;
- le
statut de l'être humain, et notamment ses rapports avec le divin, avec
la nature, avec les autres individus (d'un autre sexe, d'un autre groupe),
etc. ;
- la genèse d'une société humaine et ses relations avec les
autres sociétés.
L'étude des mythes est appelée mythologie.
Le terme mythe est souvent employé pour
désigner une croyance manifestement
erronée au premier abord, mais qui peut se rapporter à des éléments concrets
exprimés de façon symbolique1 et
partagée par un nombre significatif de personnes.
Le mythe se distingue de la légende
(qui suppose quelques faits historiques identifiables), du conte
(qui se veut inventif sans expliquer), et du roman (qui
"explique" avec peu de fondements).
Définitions
D'après le Dictionnaire de l’Académie française2,
le sens premier du mot mythe, apparu au XIXe siècle,
est un récit
fabuleux, pouvant contenir une morale
plus ou moins implicite.
Un mythe implique souvent plusieurs personnages
merveilleux,
tels que des dieux, des animaux chimériques ou savants, des hommes bêtes, des anges ou
des démons, et l'existence d'autres
mondes.
Il serait exagéré de prendre un mythe au pied
de la lettre, et de croire que les peuples les tiennent pour une description parfaitement
exacte (y compris les aspects surnaturels) du
déroulement des événements. Il serait sans doute tout aussi tendancieux de les
analyser comme de simples récits poétiques, dépourvus de base réelle, des
formes archaïques de réflexions philosophiques et proto-scientifiques,
réalisées par une analogie poétique plus que
sur la logique,
et exprimées sous une forme symbolique,
voire une sorte de roman.
Ces histoires ne sont pas arbitraires :
- les
différentes sociétés, même très différentes et sans contacts culturels,
présentent des mythes qui utilisent les mêmes archétypes ;
- les
mythes traitent toujours les questions qui se posent dans les sociétés qui
les véhiculent. Ils ont un lien direct avec la structure religieuse et sociale du peuple, et avec
leur cosmogonie.
Les philosophes de l'époque post-mythique, tels
que Protagoras, Empédocle et
Platon
utilisent le mythe comme une mise en scène allégorique
afin de faire percevoir leurs propos d’une manière concrète. Par exemple, Platon
crée des mythes originaux (par exemple le mythe de la caverne), ou réadapte des
mythes antérieurs. À sa suite, d'autres philosophes ou certains auteurs de
discours argumentatifs ont, eux aussi, eu recours au mythe, dans un même
emploi. Dans son essai Anthropologie structurale,
l'anthropologue français Claude Lévi-Strauss, offre cet avis
(1958/74 - 231):
"Un mythe se rapporte toujours à des
événements passés avant la création du monde […] ou […] pendant les premiers
âges […] en tout cas […] il y a longtemps […]. Mais la valeur intrinsèque
attribuée au mythe provient de ce que les événements, censés se dérouler à un
moment du temps, forment aussi une structure permanente. Celle-ci se rapporte
simultanément au passé, au présent et au futur."
Aspects
des mythes
Le mythe raconte une histoire sacrée, performative
pour celui qui appartient à la culture qui le crée. Il relate non seulement
l'origine du monde, des animaux, des plantes et de l'homme, mais aussi tous les
événements
primordiaux à la suite desquels l'homme est devenu ce qu'il est
aujourd'hui, c'est-à-dire un être mortel, sexué, organisé en société, obligé de
travailler pour vivre, et vivant selon certaines règles.
Le mythe se déroule dans un temps primordial et
lointain, un temps hors de l'histoire, un Âge
d'Or, un temps
du rêve. Le mythe
cosmogonique est « vrai » parce que le monde existe. Le mythe d'identité
est « vrai » parce que la communauté dont il est l'image existe. Le
mythe d'origine est « vrai » parce que la communauté le répète pour
continuer de vivre. En ce sens, le mythe contient quasiment toujours des
éléments de liturgie.
Réciter le mythe produit une re-création du monde par
la force du rite.
L'exigence du sacrifice est l'un des plus
puissants. Le mythe n'est pas récité n'importe quand mais à l'occasion de
cérémonies : naissances, initiations, mariages, funérailles,
et tout un calendrier de fêtes et célébrations, c'est-à-dire à l'occasion
d'un commencement, d'une transformation ou terminaison dont il rend compte
(ou rend conte, c'est selon).
Typologie et éléments des
mythes
Types
de mythes
- La cosmogonie raconte
la création du monde. Voyez par exemple le mythe de la
création du monde en Égypte antique ou la légende des soleils en Amérique centrale.
- La théogonie raconte la naissance des dieux. Le poème d'Hésiode intitulé Théogonie consiste en une théogonie : il raconte la
naissance des dieux grecs antiques (la Théogonie inclut aussi une
cosmogonie, puisque certains des tout premiers dieux, comme Gaia et Ouranos, forment le monde physique) et leurs générations
successives.
- L'anthropogonie raconte la création de l'homme ; le mythe grec de Prométhée.
- Le mythe de régénération raconte une recréation du monde, le plus souvent
après un mythe de cataclysme : le monde s'effondrerait s'il n'était
périodiquement recréé; dans la même catégorie peut se ranger le mythe de
création d'une institution
susceptible de témoigner de la régénération, le mythe de
création d'une plante
dont l'utilité se manifeste lors de la régénération ou de sa célébration,
le mythe de
création d'un animal qui
joue un rôle dans la célébration, soit comme victime du sacrifice, soit
comme support de la théophanie;
- Le mythe de
séparation du Divin et du monde et le mythe de
séparation du Divin et de l'homme s'accompagnent fréquemment d'un mythe de
l'invention de la mort.
Voyez à Âge d'or.
- Le mythe de fondation raconte la fondation d'une communauté ou d'une
ville, par exemple l'histoire des jumeaux Romulus et Rémus relatant la fondation de Rome.
- Le mythe
eschatologique, racontant la fin de l'univers, par exemple le Ragnarök de la mythologie nordique. Voyez à Fin du monde et Eschatologie.
Quelques
mythes célèbres
Cette section doit être recyclée.
Une réorganisation et une clarification du contenu sont nécessaires. page de discussion
« Aussi,
l'amateur de mythes (philomuthos) est philosophe (philosophos) en
quelque sorte, car le mythe est composé de merveilles. » Aristote, Métaphysique, 982b18-19- Cosmogonie et anthropogonie :
- Dans la Bible :
- le chapitre 1 du Livre de la Genèse constitue le premier récit de la Création, et correspond à une cosmogonie à partir d'un substrat existant de chaos et d'eaux primordiales ;
- les chapitres 2
et 3 du Livre de la Genèse constituent le second récit de la Création qui se situe dans le jardin d'Éden, et correspondent à une anthropogonie ; ils contiennent des références
mythologiques à l'arbre de vie, symbole d'immortalité, et à l'arbre de la
connaissance du bien et du mal, symbole du savoir illimité, caractéristiques de Dieu3 ;
- La Théogonie d'Hésiode qui décrit la création du monde, l'histoire des dieux,
la création des hommes.
- Njeddo Dewal, mère de la calamité : conte initiatique peul ;
- Le Mythe de la Sérigraphie, propagé par la culture Berbère Occidentale .
- L’Odyssée (« l'histoire d'Ulysse »,
d'après le nom grec d'Ulysse, « Odysseus »)
- L’Iliade (du grec
« Ilion », autre nom de Troie)
- Mythes de
régénération et de cataclysme
- Le Déluge (Bible, Genèse), où Dieu ne sauve qu'un petit groupe de survivants et un
couple d'animaux de chaque espèce.
- Le mythe de Proserpine ou Perséphone, qui rend compte de l'alternance des saisons
froides et stériles et chaudes et fécondes.
- La cosmogonie aztèque commence par la destruction des quatre soleils
primordiaux;
- Le mythe de la
destruction de l'Atlantide
- L'un des derniers
mythes de par son importance à être apparu est sans aucun doute celui du postmodernisme. Selon cette conception, l'humanité serait
vouée à sa perte de par sa soif insatiable de développement
technologique. Dans la perception des tenants du postmodernisme, ce sont les machines qui auraient maintenant
l'emprise sur l'humanité (voir par exemple le film Matrix qui
illustre particulièrement bien cette croyance et cette lutte contre la
fatalité). D'autre part, il est remarquable que l'idéologie postmoderne
tire sa force de son opposition à la modernité. Cette dernière époque
étant marquée par le recours à la raison comme fondement de l'autorité
afin que les hommes puissent débattre entre eux en se débarrassant du
poids des superstitions de toutes sortes. Le postmodernisme déclare qu'il n'y a plus de raison, en voulant
dire que la conduite des hommes sur la Terre tend inévitablement à
l'autodestruction, que la conciliation des intérêts de tous et chacun est
une chimère, car cet objectif étant irréalisable de par la nature même
des hommes qui sont en fait des êtres animés par la cupidité.
- Mythe de l'homme
- Le mythe prométhéen
qui dit que Prométhée apporta le feu aux hommes.
- Le mythe de Don Juan, repris
plusieurs fois, parle d'un homme pour qui le seul plaisir réside dans la
conquête et la séduction des femmes.
- Mythe de création
d'une institution
- Le mythe d'Hiram, architecte du Temple de Salomon, dont se réclament les sociétés maçonniques et les Compagnons du
Tour de France.
- Le roman « néo
scientifique » d'Alfred Jarry, Gestes et Opinions du Docteur Faustroll, pataphysicien, dont se réclame le Collège de ’Pataphysique.
- Mythe de
séparation des hommes et des dieux, du monde et de Dieu
- Dans la Bible, la Chute
à la fin du chapitre 3 du Livre de la Genèse ;
- En Inde, les sacrifices aux dieux les font monter au
ciel et ils abandonnent les hommes.
- Mythe de l'enfant
berger futur grand artiste, Un
enfant garde des bêtes dans la campagne, pour se distraire de cette tâche
monotone, il dessine avec un charbon de bois sur un rocher, passe alors un
haut personnage qui décèle le talent du futur artiste, autre mythe la
mouche peinte par l'apprenti sur un tableau du maître en son absence, à
son retour celui-ci cherche à faire partir l'intruse Quentin Metsys et encore Lantara.
- Mythe des gens de
caverne repris dans le Coran, et
racontant l'histoire à la fois fascinante et douloureuse de certains
précurseurs croyants du christianisme, qui furent persécutés et
s'enfuirent à une caverne pour s'y abriter. À force de prier Dieu pour les
protéger, le miracle divin fait qu'ils s'endormirent trois siècles et
quelques années pour assister à l'avènement sinon la propagation de la
nouvelle religion sur toutes les sphères de la société.
Héros
et objets du mythe
- Héros
- l'enfant merveilleux ;
- le personnage démembré.
- Objets
la lune, le soleil ; l'eau ; le feu ; le territoire
sacré ; le vent ; la terre.
La mythologie
gréco-romaine est la synthèse de ce qu’ont en commun la mythologie
grecque et la mythologie
romaine.
Divinités communes
Grec
|
Romain
|
Caractéristiques principales.
|
Aphrodite
|
Vénus
|
Déesse de la Germination, de l'Amour des Plaisirs,
de la Beauté, et de la Séduction.
|
Apollon
|
Apollon
|
Dieu du Chant, de la Musique, de la Poésie, de la
Lumière du Soleil, de la Guérison et de l'Avenir.
|
Arès
|
Mars
|
Dieu de la Guerre, frère d’Athéna et d’Héphaïstos
|
Artémis
|
Diane
|
Déesse de la Chasse et de la Lune, sœur jumelle
d’Apollon
|
Asclépios
|
Esculape
|
Dieu de la Médecine
|
Athéna
|
Minerve
|
Déesse de la Guerre, de la Sagesse, des Artisans,
des Artistes et des Maîtres d’école, sœur d’Arès et d’Héphaïstos
|
Borée
|
Aquilon
|
Personnification du Vent du nord
|
Charites
|
Grâces
|
Déesses de la Beauté, filles de Zeus
|
Chloris
|
Flore
|
Déesse des Fleurs
|
Cronos
|
Saturne
|
Roi des Titans, père de Zeus, Hadès, Poséidon, Héra,
Déméter et Hestia
|
Déméter
|
Cérès
|
Déesse de la Nature, l’Agriculture et de la
Fertilité, sœur de Zeus, de Poséidon, d’Hadès, d’Héra, et d’Hestia, mère de
Perséphone
|
Dionysos
|
Bacchus
|
Dieu de la Vigne, des Fêtes, de la Musique et du
Théâtre
|
Ényo
|
Bellone
|
Déesse de la Guerre
|
Éole
|
Aeolus
|
Dieu et maître des Vents et des Tempêtes
|
Éos
|
Aurore
|
Déesse de l’Aurore
|
Érinyes
|
Furies
|
Déesses de la Vengeance
|
Érèbe,
Erebos
|
Erebus
|
Dieu et personnification des Ténèbres
|
Éris
|
Discorde
|
Déesse de la Discorde
|
Éros
|
Cupidon
|
Dieu de l’Amour
|
Euros
|
Vulturnus
|
Dieu du Vent d’est
|
Gaïa
|
Tellus,
Terra
|
Déesse mère et de la Terre
|
Hadès
|
Pluton
|
Dieu des Enfers, frère de Zeus, Poséidon, Héra,
Déméter et Hestia
|
Hébé
|
Juventas
|
Déesse de la Jeunesse, de la Vitalité
|
Hélios
|
Sol
|
Dieu du Soleil
|
Héra
|
Junon
|
Reine des dieux, déesse du Mariage et de la
Naissance, sœur et femme de Zeus (sœur de Poséidon, Hadès, Déméter et Hestia)
|
Héraclès
|
Hercule
|
Demi-dieu personnifiant la Force
|
Héphaïstos
|
Vulcain
|
Dieu des Forgerons et du Feu, fils d’Aphrodite,
frère d’Athéna et d’Ar
|
Hermès
|
Mercure
|
Dieu du Commerce, messager des dieux et des voleurs
|
Hestia
|
Vesta
|
Déesse du Foyer, et sœur de Zeus, de Poséidon,
d’Hadès, de Déméter, et d’Héra
|
Hygie
|
Salus
|
Déesse de la Santé
|
Hypnos
|
Somnus
|
Dieu du Sommeil
|
Ilithye
|
Lucine
|
Déesse de la Maternité
|
Moires
|
Parques
|
Déesses personnifiant le Destin
|
Muses
|
Camènes
|
Filles de Zeus qui sont au nombre de neuf. Elles se
nomment Clio, Calliope, Euterpe, Thalie, Melpomène, Terpsichore, Érato,
Uranie et Polymnie. Clio est la Muse de l’Histoire ; Calliope, la Poésie
héroïque et l’Éloquence ; Euterpe, la Musique ; Thalie, la Comédie ;
Melpomène, la Tragédie ; Terpsichore, la Danse ; Érato, la Poésie
lyrique ; Uranie celle de l’Astronomie ; Polymnie, la Rhétorique.
|
Notos
|
Auster
|
Dieu du Vent du sud
|
Nyx
|
Nox
|
Déesse et personnification de la Nuit
|
Ouranos
|
Uranus
|
Dieu père et du Ciel
|
Pan
|
Faunus
|
Dieu de la Nature
|
Perséphone
|
Proserpine
|
Déesse des plantations, Fille de Déméter et de Zeus,
et épouse d’Hadès
|
Poséidon
|
Neptune
|
Dieu des Mers et des Océans, frère de Zeus, d’Hadès,
de Déméter, d’Héra, d’Hestia, et père des Cyclopes
|
Rhéa
|
Cybèle,
Ops
|
Titanide, épouse de Cronos et mère de Zeus, Héra,
Hestia, Hadès, Déméter et Poséidon.
|
Séléné
|
Luna
|
Déesse de la Lune
|
Thanatos
|
Orcus, Mors,
Letus
|
Dieu de la Mort, frère jumeau d’Hypnos
|
Thémis
|
Justitia
|
Déesse de la Justice
|
Zéphyr
|
Favonius
|
Personnification du Vent d’ouest
|
Zeus
|
Jupiter
|
Roi des dieux, dieu de la Foudre et du Ciel, marié à
Héra, frère de Poséidon, d’Hadès, de Déméter, d’Héra, d’Hestia, père de tous
les dieux
|
Objets
d'étude : Le personnage de roman - Les réécritures.
Don
Quichotte
Faust
Don Juan
Robinson
Crusoé
Le
détective
Le
robot
Le
monstre
La ville.
Don Quichotte
On Quichotte est un personnage qui, bien qu'issu d'un
seul roman, a pénétré l'imaginaire universel de manière durable. Le héros de
Cervantes condense, il est vrai, un certain nombre de postulations humaines
fondamentales et s'inscrit de manière significative dans son temps. Il
satisfait donc aux deux conditions de la vie mythique, exploitant à la fois le
contenu manifeste de son époque et son contenu latent. Manifeste est tout
d'abord le refus des valeurs mercantiles que cet être passionné d'idéal
constate partout autour de lui. Don Quichotte, vieux lecteur à la cervelle
fêlée, incarne le millénarisme, cette nostalgie de l'Âge d'or au cœur de l'âge
de fer : Rousseau, puis les Romantiques, pour ne pas dire les hippies, s'en
souviendront. Mais le Chevalier à la Triste Figure exprime aussi cette foi en
l'homme qui court sous la trame des temps : si c'est être fou que de croire à
l'Amour, à la Fidélité, à l'Honneur, alors Don Quichotte est fou, d'une démence
choisie qui sait à l'occasion trouver quels accents de raison ! L'excès du
personnage, le registre burlesque de ses aventures, génèrent même la
contestation du mythe héroïque de la Quête par un autre motif, étonnamment moderne,
qu'on pourrait identifier - idiot, rêveur, "clochard céleste" - à
celui de l'homme perdu dans son temps. A tous ces titres, les variations sur le
thème quichottesque sont innombrables.
Faust
On pourrait rapprocher le docteur Faust,
mythe germanique, d'un nombre important de fables universelles concernant le
péché de connaissance : Faust, qui vend son âme au Diable moyennant la jeunesse
et le pouvoir, n'est-ce pas Adam, n'est-ce pas Prométhée ? Il incarne en effet
le caractère coupable de la libido sciendi, quand ce
désir affirme l'Homme contre son Créateur. En Faust peuvent se reconnaître tous
les hommes de recherche que tentent, tôt ou tard, des secrets défendus. La
Renaissance s'est largement emparée de ce mythe dont elle a fait le parangon de
l'aventure humaine. Mais le Romantisme devait contribuer à approfondir et
élargir à la fois le personnage faustien : avec Goethe, il devient exemplaire
d'une quête idéale d'accomplissement de l'esprit et du corps où se déploie la
double postulation des hommes vers le Bien et le Mal. Les modernes, à travers
le symbole du pacte diabolique, ont choisi de valoriser à travers Faust le
problème d'une liberté engagée dans ce choix fondamental.
Don Juan
Le personnage de Don Juan
est avant tout un mythe. Les efforts d'identification à un
personnage réel sont sujets à controverse ; on peut cependant lui
reconnaître certains traits qui lui sont propres.Fondamentalement, Don Juan recherche et vit dans le plaisir et la jouissance du présent, s'opposant aux contraintes et aux règles sociales, morales et religieuses, et ignorant volontairement autrui. Il est donc à la fois jouisseur et cynique, également égoïste et destructeur. Cela correspond à l'image du libertin au XVIIe siècle.
L'histoire initiale
Le personnage mythique de Don
Juan serait né d'un fait divers3 rapporté par la Chronique de
Séville. Selon la légende, il aurait vécu au XIVe siècle :
fils de l'amiral Alonso Jofre Tenorio, Don Juan Tenorio aurait tué le commandeur Ulloa dont il avait séduit la fille,
et les moines du couvent où fut enterré le commandeur, outrés de cet acte,
l'auraient assassiné et fait disparaître son corps, racontant ensuite qu'il
avait été foudroyé par le Ciel et entraîné en enfer comme châtiment de ses fautes et de son refus de se repentir4. Mais les Cronicas de Sevilla
et les archives des familles Tenorio et Ulloa sont muettes. Les noms des
personnages ne sont pas fictifs, il a bien existé un don Juan Tenorio, ou un
don Alonso Tenorio mais nulle part il n'est fait mention d'une disparition
suspecte, encore moins du miracle de la statue de pierre qui s'anime pour punir
un débauché3.Il est beaucoup plus vraisemblable de croire que le succès de la pièce du moine espagnol frère Gabriel, plus connu sous le nom de Tirso de Molina, (qui met en scène un personnage de jeune débauché porté sur la jouissance, personnage assez habituel dans les comédies espagnoles des XVIe et XVIIe siècles) est à l'origine de la légende3. Mais ce sont les éléments surnaturels qui ont le plus contribué à la survie de cette fable dans l'imaginaire collectif5, et à la création du mythe. Il est probable qu'il faut y voir la récupération d'un thème moral (la punition du méchant) fréquemment utilisé dans les collèges religieux ou les ballades populaires6.
Chez
Molière
Article
détaillé : Dom Juan ou le Festin de pierre.
- Plaisir : hédoniste, il reprend le
personnage de Molina, mais de nature intrinsèquement sensuelle Don Juan ne
recherche plus la simple jouissance physique ;
- Égoïsme cynique : hypocrite, cynique et
froid, il manipule hommes et femmes, séduit par le discours pour faire
tomber la femme qu’il désire, promet mensongèrement le mariage, déshonore
les femmes ;
- Défi : fier et orgueilleux, Don Juan
veut affirmer sa supériorité sur tout et tous, y compris la morale et la
religion ;
- Antisocial : totalement opposé aux
devoirs qu’impose la vie sociale, totalement opposé au respect de l’autre
et à la charité chrétienne, bien que paradoxalement doté d'un certain sens
de l'honneur (dernière réplique de la scène II de l'acte III) ;
- Matérialisme : libertin, impie, il ne
se repent jamais, même plongé dans les flammes de l’enfer ;
- Pouvoir et conflit : violence verbale
et parfois physique, menaces, refus de la contrainte, abus du pouvoir de
séduction, abus du pouvoir de sa position sociale.
Robinson Crusoé
Le marin écossais Alexander Selkirk fut
abandonné par son équipage en 1704 sur un îlot désert de l'archipel Juan
Fernandez, au large du Chili : il y vécut seul quatre ans et demi. Le romancier
irlandais Daniel Defoe s'empara du sujet pour en faire un des plus grands
succès de la littérature universelle (le seul roman que Rousseau tolérât dans
un but pédagogique !). Dans l'esprit des Lumières, Robinson incarne le triomphe
de l'industrie humaine sur la sauvagerie naturelle. Devant son esclave
Vendredi, il est l'Occidental convaincu de l'universalité de ses valeurs. Mais
on sait quel retournement Michel Tournier fit subir au mythe à la lumière de la
mauvaise conscience du colonisateur : la fable manifesta sa souplesse en
adoptant le point de vue du colonisé, fustigeant dès lors l'ethnocentrisme.
Mais l'histoire de Robinson, c'est aussi une aventure qui fédère tous les
thèmes du voyage et de l'ailleurs : à ce titre, toute littérature insulaire
alliant exotisme et mystère peut s'en réclamer, et la liste pourrait être
longue.
Le détective
Sous les
formes diverses qu'il peut prendre dans la littérature, le mythe du détective
semble être l'un des plus anciens, peut-être parce qu'il correspond à l'enquête
que l'homme ne cesse de mener pour éclaircir l'affaire qui lui importe le plus
: « D'où venons nous ? Que sommes
nous ? Où allons nous ? » C'est sans doute pour cela qu'on s'accorde en général
à reconnaître dans le personnage d'Œdipe le prototype du détective, d'autant
que ce personnage est au centre d'un scénario que l'on s'est inlassablement
réapproprié, celui de l'enquête menée par le criminel sur son propre crime.
Mais le détective est aussi le fils du rationalisme et du scientisme, et s'épanouit
pour cela dans la deuxième moitié du XIXe siècle et la première moitié du XXe :
il coïncide avec une époque où l'on entend manifester la toute-puissance de
l'intelligence humaine sur les déterminations de la nature et du hasard. Les
avatars du détective sont trop nombreux pour que l'on tente dans ce cadre d'en
établir une liste exhaustive. On trouvera ci-dessous quelques exemples de
personnages, suivis de la mention de leur première apparition dans l'œuvre de
certains auteurs familiers du genre policier. Pour se limiter à la littérature
française, on peut peut-être établir l'origine de cette figure du détective
dans celle de François-Eugène Vidocq qui inspira, entre autres, Balzac, Hugo,
Dumas, Eugène Sue, tous grands romanciers de la ville et de ses mystères. A
partir du XIXème siècle, l'urbanisation grandissante et les fantasmes dont elle
est responsable contribuent d'ailleurs à donner au détective son auréole
mythologique et expliquent son empreinte poétique dans beaucoup de romans et de
films.
Le robot
Si le
détective est un mythe à la gloire de la raison humaine, le robot, androïde
capable d'exécuter des travaux à la place de l'homme, pourrait bien, lui, être
né de la méfiance qu'inspirent des conquêtes technologiques de plus en plus
sophistiquées. Cemythe de défaite marque très tôt l'histoire de l'humanité :
n'est-ce pas déjà l'histoire de Pygmalion, racontée par Ovide dans sesMétamorphoses ? Ou bien celle de ces esclaves d'or
forgés par Héphaïstos, que rapporte Hésiode dans Les
Travaux et les Jours? Ou encore celle de l'Apprenti sorcier dans le
poème de Goethe (1797), celle du Golem pragois dont beaucoup de textes nous
entretiennent avant Gustav Meyrink ? En tout cas, s'il préexiste à l'ère du
machinisme pendant laquelle le tchèque Karel Čapek
invente le mot à partir du substantif robota (corvée),
ce mythe connaît une fortune littéraire et surtout cinématographique au moment
où la machine gagne une relative autonomie. L'intelligence artificielle
gouvernant le travail des hommes finit par inspirer la peur de l'asservissement
et du totalitarisme le plus aveugle. Ce fantasme est bien caractéristique du
pouvoir que détient le mythe de condenser nos terreurs et de nous les renvoyer
dans l'espoir de quelque catharsis.